Vers une gouvernance démocratisée du secteur extractif en RDC : lancement d’un projet citoyen piloté par le Centre Carter

Le 12 juin 2025, le Centre Carter a officiellement lancé à Kinshasa un nouveau projet ambitieux intitulé « Démocratisation de la gouvernance du secteur extractif en RDC à travers un contrôle citoyen effectif et inclusif ». Ce programme vise à renforcer la transparence, la redevabilité et la participation citoyenne dans la gestion des activités et des revenus issus du secteur extractif en République Démocratique du Congo (RDC).

Un cadre multipartite et représentatif

La cérémonie de lancement a rassemblé une diversité d’acteurs : représentants du ministère des Mines, membres de la société civile, ONG, journalistes spécialisés, partenaires techniques et financiers, membres du Consortium Ressources, délégués de la GIZ, de l’ambassade de France, ainsi que le représentant-pays du Centre Carter. Ce large éventail d’intervenants traduit la volonté d’instaurer une gouvernance plurielle et concertée autour des ressources naturelles.

Une vision portée par le Centre Carter

Dans son discours inaugural, M. Romain, représentant-pays du Centre Carter, a rappelé que son organisation s’investit dans le secteur extractif congolais depuis 2007, convaincue que ce secteur, pilier de l’économie nationale, doit devenir un levier de développement équitable. La démocratisation du secteur repose, selon lui, sur plusieurs piliers :

  • La mise en œuvre de réformes structurelles ;
  • L’implication active de la société civile, des jeunes, des gouvernants et du secteur privé ;
  • La fourniture d’informations accessibles et de qualité à la population ;
  • Le renforcement des mécanismes de redevabilité à travers des réseaux citoyens ;
  • Le plaidoyer pour des politiques publiques plus justes.
  1. Romain a souligné le paradoxe frappant entre l’abondance des ressources naturelles et la pauvreté persistante des populations, appelant à une mobilisation collective et coordonnée des acteurs

Un panel d’experts aux perspectives complémentaires

La séance s’est poursuivie par un panel d’échanges où différents acteurs ont partagé leurs visions sur les enjeux et les opportunités du projet.

  • Le représentant de la société civile a insisté sur les avancées enregistrées en matière de négociation des contrats miniers et de signature des cahiers des charges. Il a toutefois déploré que la participation de la société civile demeure souvent symbolique, appelant à un engagement plus qualitatif et structurant.
  • M. Yvon Kabeya, représentant de la GIZ, a salué le lancement du projet comme un complément stratégique à la dynamique déjà amorcée. Il a mis en exergue l’importance de bâtir la confiance entre les parties prenantes, de former les gestionnaires des Entités Territoriales Décentralisées (ETD), et de mettre en place des mécanismes de contrôle citoyen efficaces. La GIZ a également soutenu l’idée de renforcer les conseils locaux pour assurer un suivi participatif de la gestion des revenus miniers : combien est perçu, combien est dépensé, et selon quelle affectation.
  • Le président de la Chambre des Mines a quant à lui appelé à une approche globale, insistant sur le rôle du dialogue entre partenaires pour une meilleure exploitation des ressources. Il a plaidé pour une participation inclusive intégrant le genre, les jeunes, les enfants, ainsi qu’une lecture critique des cahiers des charges. Il a rappelé que la redevabilité doit être exigée de toutes les parties. Selon ses propos : « À ce jour, plus de 30 milliards de dollars ont été générés par le secteur ; il est impératif de se demander ce qu’il en a été fait concrètement ».
  • Du côté de l’Union Européenne, le soutien à ce projet s’inscrit dans le cadre de son partenariat stratégique avec la RDC, en particulier en matière de gouvernance des ressources naturelles. L’UE a souligné son engagement à renforcer le dialogue entre les entités gouvernementales, la société civile et le secteur privé. Elle a toutefois posé une question essentielle : avec quelle société civile dialoguer ?, soulignant le besoin d’une société civile structurée, unie et représentative.

Conclusion : un pas de plus vers la gouvernance partagée

Le projet lancé par le Centre Carter marque une étape importante dans la construction d’une gouvernance extractive démocratique en RDC. Il s’inscrit dans une logique de co-construction des politiques publiques, où l’information, la participation et la redevabilité constituent les pierres angulaires d’un avenir plus équitable pour les communautés riveraines des projets miniers. La réussite de cette initiative dépendra de la capacité des acteurs à travailler en synergie, à dépasser les clivages institutionnels et à faire de la gouvernance des ressources naturelles un levier de justice sociale et de développement durable.