Kidnapping à Kinshasa : un procès public qui soulève des questions

Depuis quelques semaines, la ville de Kinshasa est secouée par une vague d’enlèvements de personnes à bord des taxis, qui seraient liés à un trafic d’organes. La police nationale congolaise (PNC) a annoncé avoir arrêté 27 présumés kidnappeurs, dont quatre policiers et six femmes, et les a présentés à la presse et au ministre de l’intérieur ce lundi 4 juillet 2023.
Le lendemain, le procès public des accusés a débuté au bâtiment de la Territoriale, en présence du procureur de la République, du commissaire provincial de la PNC, Sylvano Kasongo, et de plusieurs témoins et victimes. Les prévenus ont été interrogés sur leurs motivations, leurs modes opératoires et leurs complices éventuels. Certains ont reconnu les faits qui leur sont reprochés, tandis que d’autres ont clamé leur innocence ou invoqué des circonstances atténuantes.
Toutefois, ce procès public ne semble pas convaincre tout le monde. Plusieurs observateurs ont dénoncé la précipitation avec laquelle la procédure a été menée, sans approfondir les enquêtes pour démanteler le réseau criminel dans son ensemble. Ils ont également souligné les contradictions et les sous-entendus dans les déclarations de certains prévenus, qui laissent penser qu’il y a des acteurs plus importants ou plus influents derrière ce phénomène.
Par exemple, l’un des accusés a affirmé avoir reçu des ordres d’un certain « général » qui lui aurait fourni une arme et une voiture. Un autre a déclaré avoir été recruté par une femme qui lui aurait promis une forte somme d’argent en échange de son implication dans le kidnapping. Une troisième a avoué avoir participé à l’enlèvement d’une fille qu’elle connaissait, mais qu’elle ignorait qu’elle allait être tuée et que ses organes allaient être prélevés.
Ces témoignages soulèvent des questions sur l’identité et le rôle des commanditaires et des bénéficiaires de ce trafic d’organes, ainsi que sur les moyens mis en œuvre pour le réaliser. Où sont stockés et transportés les organes prélevés ? À qui sont-ils destinés ? Quels sont les intermédiaires impliqués ? Quelles sont les structures sanitaires ou administratives complices ou laxistes ?
Face à ces interrogations, la PNC a tenté de rassurer la population kinoise en affirmant sa détermination à éradiquer le kidnapping dans la capitale. Elle a également ouvert une ligne téléphonique spéciale pour signaler les cas d’enlèvement. Par ailleurs, elle a dénoncé une campagne de diabolisation contre les forces de l’ordre, en affirmant que plusieurs messages sur les réseaux sociaux et dans les médias sur l’enlèvement ou le trafic d’organes ne sont pas conformes à la vérité.
Néanmoins, certains citoyens restent sceptiques et craignent que ce procès public ne soit qu’un spectacle médiatique destiné à calmer les esprits, sans réellement s’attaquer aux racines du problème. Ils réclament plus de transparence et de rigueur dans la conduite des enquêtes, ainsi que plus de protection et de justice pour les victimes.
Le phénomène de kidnapping à Kinshasa est un sujet sensible et complexe, qui nécessite une approche globale et coordonnée entre les différents acteurs impliqués : la police, la justice, les autorités locales, les médias, la société civile et la population. Il en va de la sécurité et de la dignité des habitants de la capitale congolaise.